À l’issue du conseil des ministres tenu le 18 décembre 2020, les gabonais apprenaient qu’une modification de la constitution était en projet. L’organisation internationale Tournons La Page rejette avec la plus grande énergie la proposition de loi portant modification des articles 4, 7, 10, 13,13a, 14a, 14d, 28a, 34, 35, 36, 37, 38, 41, 48, 58a, 61, 62, 73, 78, 80, 83, 84, 85, 90 et 112 de la Constitution de la République Gabonaise. Cette énième modification par projet de loi et non par referendum constitue un profond recul démocratique pour un pays qui étonnamment a été élu membre du Conseil des Nations-Unies pour les Droits de l’Homme.
Ce projet de modification de la loi fondamentale porte essentiellement sur :
- L’article 13a qui dispose qu’en cas de vacances de pouvoir ou d’empêchement définitif du Chef de l’Etat, l’intérim de la fonction présentielle sera assumé par un Collège composé des deux Présidents des deux Chambres du Parlement et du Ministre de la Défense Nationale ;
- L’article 35 qui donne désormais le pouvoir au Président de la République de nommer des Sénateurs ;
- L’article 78 qui consacre une immunité absolue au Chef de l’Etat une fois l’exercice de ses fonctions achevées.
Tournons La Page dénonce :
- la légèreté avec laquelle la Constitution de la République, socle du vivre-ensemble du peuple gabonais, est une fois de plus modifiée au seul gré d’une minorité de privilégiés ;
- la violation du principe de la séparation des pouvoirs consacrée par l’article 5 de la Constitution gabonaise, en permettant au Président de la République qui relève du pouvoir exécutif de nommer des Sénateurs qui eux relèvent du pouvoir législatif ;
- la militarisation du pouvoir exécutif matérialisée par l’élévation du Ministre de la défense au rang de Président de la République par intérim, au même titre que des Présidents d’institutions élus comme parlementaires par le peuple pour exercer le pouvoir législatif et contrôler le pouvoir exécutif.
Faut-il rappeler que le Gabon vit depuis des mois sous un régime d’état d'urgence sanitaire. Ce qui signifie clairement en situation d'exception. Or, il ne peut y avoir révision de la Constitution en situation d'exception. Tournons La Page demande le retrait pur et simple de cette proposition de révision constitutionnelle.
Tournons La Page appelle au sens républicain des parlementaires gabonais à qui ce projet sera soumis pour adoption et les renvoie à leur responsabilité devant l’histoire.
Enfin, face à l’expression maintes fois réaffirmée depuis les années 1990 par le peuple gabonais de sa soif de démocratie, Tournons La Page interpelle les autorités gouvernementales et institutionnelles de la République sur la gravité de telles dérives et invite l’ensemble des acteurs de la société civile, les leaders d’opinion, les acteurs politiques de la majorité et de l’opposition à tout mettre en oeuvre pour éviter que ce projet de loi ne prospère.
Fait à Libreville, le 21 décembre 2020
Pour TLP-Gabon - Nathalie ZEMO EFOUA, coordinatrice
Pour la coordination internationale de TLP - Marc ONA ESSANGUI, président