Une nouvelle vague répressive déferle sur le Togo en cette fin d'année 2021, frappant en 40 jours 5 journalistes et activistes politiques. En l'espace de 48 heures, 4 autres personnes subissent l'arbitraire des autorités togolaises, portant à 116 le nombre de prisonniers politiques sur lequel 7 sont morts du fait de leur détention. Ces arrestations confirment la volonté de faire taire les voix critiques du pouvoir et constituant de graves atteintes à la liberté d'expression.
1 - Jeudi 4 novembre 2021 : arrestation de Jean-Paul OUMOLOU : Activiste politique et militant de la Dynamique Monseigneur KPODZRO (DMK) résidant en Suisse, Jean-Paul OUMOLOU a été enlevé au petit matin au quartier Hédzranawoé à Lomé par des agents de la Gendarmerie nationale lourdement armés et cagoulés qui, après avoir bouclé tout le quartier, se sont saisis de lui après l'avoir violenté. Conduit au Service central de recherches et d'enquêtes criminelles (SCRIC), il y a subi de longs interrogatoires à la suite il a été présenté au Procureur de la République et au Juge d'instruction. Il est accusé d'appel à l'insurrection du peuple et de l'armée ; diffusion de fausses nouvelles ; excuses de crime ;outrage à l'autorité publique.
2 - Jeudi 9 décembre 2021 : arrestation et emprisonnement du journaliste Ferdinand Messan AYITE , directeur de publication du journal L'Alternative. Il a été convoqué à la Brigade de recherches et d'enquêtes (BRI) uniquement pour avoir tenu, dans l'émission « L'autre journal » sur Youtube, des propos critique envers deux ministres du gouvernement. Il est accusé « d'outrage à l'autorité » sur la base de l'article 490 du Code de procédure pénale alors que les délits de presse ont été dépénalisés depuis 2004 au Togo. Gardé à vue et incarcéré au BRI dans la soirée, il est conduit, le lendemain 10 décembre, chez le Juge d'instruction qui confirme les chefs d'accusation et le place sous mandat de dépôt dans la soirée.
Cette arrestation intervient 5 mois après que le nom de Ferdinand a été découvert parmi les personnalités placées sous surveillance via le programme d'espionnage Pegasus. Sans compter le fait que son journal ait été suspendu pendant 4 mois le 9 avril 2021.
3 - Vendredi 10 décembre 2021 : arrestation et emprisonnement arbitraire du journaliste Joël Vignon EGAH , directeur de publication du journal Fraternité et la mise sous contrôle judiciaire de son confrère Isidore KOUWONOU , rédacteur en chef du journal L'Alternative et Secrétaire général du Syndicat des journalistes indépendants du Togo (SYNJIT). Tous deux participaient à l'émission « L'autre journal » le premier en tant que participant, le second comme modérateur. Comme Ferdiannd Ayité, ils sont accusés « d'outrage à l'autorité ». Amenés devant le juge d'instruction, Joël EGAH est placé sous mandat de dépôt et Isidore KOUWONOU se voit placer sous contrôle judiciaire.
Ces événements se déroulent au moment de la célébration de la journée internationale des droits humains que les autorités togolaises ont choisi de malmener. A u moment où le monde entier célébrait l'universialité des droits humains, la justice togolaise muselait trois journalistes . Ces derniers étaient en train de faire l'analyse de la situation sociopolitique du pays ; En clair, ils étaient dans l'exercice de leur fonction et les faits reprochés ne sont pas détachables de cette fonction.
Sur le plan juridique, il appartient à la HAAC, organe de régulation des médias, de statuer sur une quelconque atteinte à la déontologie. En aucun cas un commandant de la gendarmerie ne doit procéder à l'arrestation des journalistes, encore moins un procureur de les placer sous mandat de dépôt.